Sélectionner une page

Mermaids : quand trois structures s’associent pour accompagner et visibiliser les musiciennes de leur territoire 

Mai 5, 2023

 Pour cette Wah’actualités, nous nous rendons dans les Hauts-de-France, à la rencontre d’un projet appelé Mermaids, porté non pas par une, ni deux, mais trois structures locales : Le Grand Mix, Loud’her, et Mermaids. Avant d’évoquer le projet, quelques présentations s’imposent…

Le Grand Mix basé à Tourcoing, est un lieu historique dédié aux musiques actuelles, ouvert depuis 1997. Équipé d’une grande salle de concert et depuis 2019 d’un club, mais aussi de studios de répétition, ce lieu, géré par l’association La Passerelle, porte un projet participatif et responsable, inscrit dans des projets de coopération européens et porteur d’une démarche de développement durable précurseuse.

Quant à Loud’her, ce nom vous est sans doute familier puisque nous avons déjà évoqué ce collectif dans un précédent articlerelatif à leur projet de résidence de création musicale en mixité choisie : BLAM. Basé à Lille, il œuvrait à l’échelle des Hauts-de-France pour la visibilisation des femmes et minorités de genre dans les musiques actuelles. Enfin, Mermaids est un collectif de femmes qui produisent et font de la musique. L’artiste Mythie, associée et à l’origine de ce projet, est chanteuse, compositrice et productrice lilloise et a assuré notamment le lien avec un groupe jusqu’ici informel de musiciennes du territoire.

Par le biais de ce projet commun, ces trois structures souhaitent questionner les discriminations à l’œuvre à l’intersection des difficultés rencontrées par les musiciennes du fait de leur genre et de leur âge. Parce que les temps de professionnalisation et de développement de carrière sont longs, les musiciennes font face à de nombreuses difficultés qui leur sont spécifiques : conciliation vie professionnelle et personnelle, charge des obligations parentale et domestique, inaccessibilité des dispositifs d’accompagnement et tremplin, arrêt de leur pratique musicale…

Pour aborder ces questions, le projet Mermaids est composé de plusieurs temps. D’abord, une série de workshops à destination des musiciennes et parfois des techniciennes. Ils sont l’occasion d’aborder des thématiques comme la créativité, la légitimité et la confiance en soi ou la parentalité, avec notamment un temps fort dédié à cette question au mois de mai durant lequel le collectif des Mattermittentes interviendra.

En plus de ces temps, l’artiste Mythie produit un podcast avec pour objectif de visibiliser les artistes et musiciennes du territoire par la réalisation de portraits sonores, écrits et vidéos, mais aussi de témoignages et d’interviews autour de différents thèmes abordés à l’occasion des workshops.

Enfin, une journée « crash test » sera proposée aux artistes qui le souhaitent, pour tester un set, des créations ou compositions au sein d’un espace de confiance, en mixité choisie, où elles pourront recevoir des conseils ou avis bienveillants de la part des autres musiciennes et qui finira par une jam.

Pour nous parler de ce projet, nous rencontrons Mathilde Chedaleux, en service civique depuis plusieurs mois en tant qu’attachée à l’action culturelle au Grand Mix impliquée sur ce projet d’accompagnement et de mise en valeur des musiciennes du territoire.

Entretien avec Mathilde Chedaleux

Quelles utopies porte ce projet ?

Ce projet a globalement deux objectifs : d’une part, la visibilisation des femmes musiciennes et de leur travail et le partage de moments de création, qui favorisent l’interconnaissance entre elles, la mise en commun et la sororité.

En sociologie, on parle du double standard de l’âge et du genre, en réalité, ça s’applique très bien dans le champ culturel et des musiques actuelles

Quelles sont les forces vives de ce projet ?

C’est d’abord le fait qu’on soit trois associations avec trois visions différentes, mais également avec des moyens et outils différents. Le fait d’être impliqué dans un réseau de musiciennes, c’est une vraie chance car nous avons pu ainsi identifier ce dont elles avaient envie et besoin. Sur ce projet, nous ne sommes donc pas parties de rien.

Qu’est-ce qui vous enthousiasme particulièrement dans le fait de vivre ce projet ? Qu’avez-vous hâte de vivre ?

Suite aux deux workshops déjà organisés, nous avons eu des retours directs des participantes qui étaient très positifs. Ces temps ont permis aux musiciennes de se rencontrer, d’avoir des échanges entre personnes concernées. J’étais présente et voir en temps réel ce partage, c’était très beau. J’ai aussi hâte de vivre le passage entre les workshops et l’évènement live, sous formes de concerts. En partageant leurs créations, les musiciennes vont partager des choses très intimes, très belles, donc je pense que ça va être de chouettes moments à vivre. Ces concerts intimistes ne seront ouverts qu’à un public choisi, c’est-à-dire invité par les artistes elles-mêmes. L’objectif ici était vraiment de créer un espace intime dans lequel les musiciennes soient le plus à l’aise possible pour oser, essayer et progresser sur leurs créations.

Il y a la volonté de se détacher de la forme très descendante du « bilan scénique » généralement organisé par des hommes

Quelles figures féminines ou de personnes minorisées du fait de leur genre, vous inspirent ce projet ?

Comme ce projet est porté par trois structures, je ne saurais parler à la place des autres et comme je n’étais pas à l’origine du projet, mais seulement dans sa mise en œuvre, je ne peux pas réellement dire qui m’a inspiré ce projet. Personnellement, je pense tout de suite à ma sœur, qui est historienne du cinéma et du genre, dont nos conversations m’inspirent beaucoup. Je pense aussi au groupe The Slits, ce groupe de punk féminin de Londres des années 1970. Particulièrement la bassiste, Viv Albertine qui a écrit le livre De fringues, de musique et de mecs qui raconte sa jeunesse comme musicienne dans un milieu très masculin et machiste. Elle parle de DIY, de rapports de classe, mais aussi de sa vieillesse, sa maternité, son rapport à la musique en tant que maman, en tant que femme divorcée… Elle y fait une analyse très féministe de son rapport à la musique que je trouve très intéressante et très touchante. Cette lecture m’a beaucoup inspirée et participe encore aujourd’hui à ma vision du milieu et de ce que j’y fais par mes missions au sein du Grand Mix.

En savoir plus sur Mermaids !

D’autres articles

actualités
What About Her ? – Jeanne Ledoux

What About Her ? – Jeanne Ledoux

Devenir régisseuse son aurait pu être une évidence pour Jeanne Ledoux, originaire de Reims, musicienne depuis très jeune, aujourd’hui technicienne, assistante son à la Cartonnerie, scène de musiques actuelles de l’agglomération rémoise. Pourtant, c’est par la pratique...

lire plus
Des news

Recevez notre newsletter

Retrouvez ces informations dans notre newsletter trimestrielle en vous abonnant ci-dessous !